vendredi 28 novembre 2014

La campagne des Dardanelles, une expédition véritablement planétaire ! 


Après la parenthèse littéraire du dernier post, le blog reprend ce mois-ci le cours du tome 2 et se consacre au troisième chapitre. Intitulé "Lors d'une journée de repos", ce chapitre de transition se situe une dizaine de jours après la découverte du caveau byzantin contenant le coffret aux icônes. Les principaux protagonistes du début du roman sont au repos à l'arrière dans le camp de Seddul-Bahr près du cap Helles, à l'extrémité de la péninsule de Gallipoli. L'occasion de présenter au lecteur le caractère cosmopolite et planétaire de cette campagne des Dardanelles si particulière...  
   

C'est plus précisément le 18 juin, soit onze jours après la découverte du caveau, que débute ce troisième chapitre. On y retrouve N'Diaye, le tiraillleur sénégalais du 7e RMIC, le premier homme à avoir pénétré dans le caveau. Ce matin-là, il est donc au bivouac de Seddul-Bahr, à l'arrière de la ligne de front, et profite d'un rare moment de temps libre pour aller retrouver les zouaves qui ont participé à la découverte du caveau. Il a appris la mort de Diop, tué par leur imprudence, et souhaite leur faire part de sa plus grande rancoeur. 

Le parcours de N'Diaye, dans le dédale du camp allié, jusqu'au cantonnement des zouaves, devient alors un prétexte pour présenter au lecteur toute la diversité des troupes alliées présentes durant cette expédition. 
Troupes australiennes et indiennes débarquant le matin du 25 avril 2015
 à Anzac Beach à l'ouest de la péninsule de Gallipoli
(Wikimedia Commons - Arthur RH Joyner)

Il est ainsi rappelé que les Britanniques acheminèrent non seulement des troupes anglaises, galloises, écossaises ou irlandaises mais aussi de leurs dominions d'Asie ou du Pacifique : Indiens, Australiens ou Néo-Zélandais en particulier. 

Les Français, eux, ont réuni des troupes coloniales composées d'Européens d'Afrique du Nord pour la plupart ou d'Antillais, mais aussi des zouaves, ainsi que des tirailleurs venus de toutes les possessions françaises en Afrique de l'Ouest. 
Vue panoramique sur la flotte alliée près des Dardanelles (Wikimedia Commons - Jonathan Schroden)

Quatre continents plus les Antilles sont ainsi représentés : Europe, Asie, Afrique et Océanie. 
Carte des plages de débarquements britanniques 
du 25 avril 1915 au Cap Helles (Wikimedia Commons- Gsl)

L'expédition était d'envergure avec près de 75 000 hommes impliqués lors du débarquement du 25 avril au tout début des opérations terrestres de l'expédition. Le plus grand débarquement de l'histoire militaire mondiale jusqu'à un certain 6 juin 1944... 





Carte des plages de débarquements australo-néo-zélandais
du 25 avril 1915 dans le secteur de Suvla Bay (Wikimedia Commons - Gsl)


Face à eux, les Turcs étaient bien organisés défensivement et encadrés par des conseillers allemands avec à leur tête le général Liman von Sanders et le colonel Mustafa Kemal, le futur Atatürk.
Carte des champs de mines et des fortifications ottomanes 
dans le détroit des Dardanelles en février-mars 1915 
(Wikimedia Commons - Gsl)
 
Mustafa Kemal entouré d'officiers
 aux Dardanelles en 1915 

(Wikimedia Commons)
Le général Liman von Sanders en 1916 
(Wikimedia Commons - Deutsches Bundesarchiv)

Bien qu'ambitieuse, l'expédition alliée était trop mal préparée et menée pour réussir. L'enlisement était total et les deux camps s'installèrent alors dans une guerre de position sur cette péninsule.

N'Diaye traversa une bonne partie du camp et croisa ainsi toute cette diversité.
Soldats britanniques (Lancashire Fusiliers) se rendant 
aux Dardanelles en mai 1915 (Wikimedia Commons - 
Imperial War Museum)



L'essentiel de ce chapitre est consacré à ces différences entre les composantes alliées : les tenues coloniales des Britanniques, aux airs de bobbies tropicaux... la décontraction et la détermination des Australiens et des Néo-Zélandais, aux allures de chasseurs lâchés dans  le bush... les Indiens avec leurs turbans et leurs barbes... les Gurkhas népalais et leur équipement traditionnel...
Charge australienne sur une tranchée ottomane fin 1915 (Wikimedia Commons - US National Archives and Records Administration)

La guerre sur et sous la mer, qui a précédé les opérations terrestres, est également évoquée avec les pertes de navires français (Le Bouvet ou le Gaulois notamment) ou britanniques (HMS Ocean ou HMS Irresistible par exemple), ainsi que de sous-marins (Le AE2 notamment, un submersible australien qui fut obligé de se saborder).
Naufrage du HMS Irresistible frappé par une mine turque 
et abandonné le 18 mars 1915 (Wikimedia Commons - The Illustrated War) 

Le HMS Louis échoué à Suvla Bay sous le feu de l'artillerie turque 
(Wikimedia Commons - Royal Navy)
Le sous-marin australien HMAS AE2 en 1915
(Wikimedia Commons - Australian War Memorial)


















Dans ce panorama, j'évoque également la pression constante que l'artillerie turque impose aux camps alliés, soit depuis les hauteurs européennes soit depuis la rive asiatique totalement aux mains ottomanes. 
Artillerie lourde turque à Gallipoli en 1915, 
canon provenant du cuirassé allemand "Roon" 
(Wikimedia Commons - Deutsches Bundesarchiv)

L'allure des troupes françaises est aussi détaillée dans toute sa diversité : troupes coloniales aux airs de chasseurs partis en safari ; l'infanterie classique portant la casquette ; la tenue des zouaves avec leurs chéchias ou celle plus colorée des tirailleurs sénégalais avec ses éléments caractéristiques et traditionnels : sac en peau de bouc et coupe-coupe en bandoulière.  
Soldat français rampant derrière les barbelés aux Dardanelles en 1915 
(Wikimedia Commons - Agence Rol, Gallica.fr)



C'est tout ce melting-pot qu'entend présenter ce chapitre.

Ce panorama est bouclé par l'évocation d'une dernière population présente dans le camp, celle des correspondants de guerre de la presse française et britannique. J'en ai justement parlé lors du post précédent, lorsque j'évoquais la présence d'Albert Londres aux Dardanelles.
Canon de 75 mm de l'artillerie coloniale française
lors de la 3ème bataille de Krithia, le 4 juin 1915 

(Wikimedia Commons - Central News Agency)

Lorsque N'Diaye arrive enfin au cantonnement des zouaves, il n'y trouve que Benhamou avec lequel il a une brève mais vive conversation au sujet de la mort de Diop. Le Sénégalais enchaîne ensuite en évoquant le coffret que l'adjudant a emmené avec lui. Comme cet objet provient du caveau, il craint que ce geste ne s'avère néfaste et porteur de malheur. Sensible au surnaturel, N'Diaye est particulièrement clairvoyant à ce sujet et en parle à Benhamou avant de le quitter.

Dans la scène suivante, Benhamou part retrouver l'adjudant Castaing qui est en train de se restaurer. Il veut avoir une discussion avec lui concernant la vente du coffret et de ses icônes. Il se met d'accord avec lui pour se partager le bénéfice de cette future vente et ainsi écarter Lacourt et N'Diaye de cette transaction.

En tant que commerçant dans le civil, Benhamou se propose des les vendre lui-même, mais le sous-officier, méfiant, préfère garder la main à ce sujet.

L'un et l'autre sentent que ces objets sont potentiellement néfastes mais la perspective de glaner un beau petit pactole leur fait oublier leur inquiétude. Castaing, en particulier, fait régulièrement des cauchemars depuis qu'il posséde ces icônes et est sans doute le plus inquiêt des deux. 

Le chapitre se termine avec une scène offrant cette fois un focus sur Lacourt. Lui-même est marqué par la découverte de ces objets ainsi que par le message en lettres de sang apparu sur la paroi du caveau. Etudiant en droit et passionné d'archéologie, cette découverte avait beaucoup de sens pour lui. Il est très déçu de ne pas avoir pu transmettre à l'état-major les objets découverts et faire partager et reconnaître ainsi ces découvertes archéologiques. Il en voulait à Castaing de les avoir confisqués avec le soutien de Benhamou. Lacourt se posait aussi beaucoup de questions concernant la tablette de défixion qu'il avait trouvé dans le tunnel. Elle était pratiquemment illisible et il n'avait pas la possibilité de l'étudier aisément ainsi sur le front.

Cette présentation de Pierre Lacourt, personnage qui va prendre un rôle central dans la suite du roman, s'achève par un flashback sur son passé. En particulier sur l'époque où, encore lycéen, il est conduit à mener un véritable bras-de-fer avec son père, magistrat à Toulouse. Ce dernier, l'obligeant à se diriger vers le droit, dans le cadre d'une longue tradition familiale, Pierre finira par accepter mais à condition de le faire à la faculté d'Alger. Il choisit cette destination autant pour s'éloigner de son père et de sa férule que pour se rapprocher des chantiers archéologiques en cours en Algérie, comme à Cherchell ou à Tipasa par exemple.
Ruines romaines du site archéologique de Tipasa sur la côte algérienne (Wikimedia Commons)

Malheureusement, la guerre vient interrompre son parcours et ses projets en août 1914, alors qu'il vient tout juste de rentrer à Alger après un séjour estival de quelques semaines chez ses parents à Toulouse. Pierre est ainsi incorporé au 1er régiment de Zouave basé à Alger et y suit plusieurs mois d'instruction avant d'être versé dans le bataillon qui gagnera Bizerte, en Tunisie, pour y intégrer le 2ème Régiment de Marche d'Afrique, spécialement constitué pour l'expédition des Dardanelles au printemps 1915.
Heinrich Schliemmann en 1892 
(Wikimedia Commons - "selbstbiographie" Leipzig, 
brockhaus)

Les Dardanelles sont un cadre et une région que Pierre connaît relativement bien de par ses lectures et sa passion pour l'archéologie. Il a notamment lu, par le passé, des rapports sur les travaux que Heinrich Schliemmann, le découvreur de Troie, y a mené un quart de siècle plus tôt. Le malheur de Pierre Lacourt, dans cette histoire, c'est qu'il est présent sur ces terres qui le font rêver non pas en tant qu'archéologue mais en tant que soldat... 

Son régiment doit d'ailleurs remonter le jour même aux tranchées, en prévision d'une offensive imminente à mener et qui aura des conséquences sur la suite de notre histoire... mais ce sera l'objet du prochain post...

A bientôt.

Olivier.         
  














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